La laideur: du corps physique au corps politique
International Symposium
Δημοσιευμένο: 2023-09-04
The symposium will take place as a hybrid event, Thursday, September 21 – Friday, September 22, 2023, physically at the Swedish Institute at Athens, Mitseon 9, and digitally on Zoom.
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Depuis une vingtaine d’années, l’étude du corps constitue un courant important de la recherche historique en général et helléniste en particulier. De nombreux ouvrages consacrés au corps en général ou à ses divers aspects (regard, parure, beauté etc.) ont vu le jour. Les représentations du corps et les discours le concernant, les modes de son appréhension et de sa réception constituent autant de créations culturelles selon le contexte socio-historique. La « fabrique » du corps implique des approches philosophiques, politiques, religieuses, sociales, économiques, psychologiques et esthétiques.
Alors que la beauté a longtemps été considérée comme constitutive de la culture grecque, les travaux sur la laideur ont été plus rares, à l’exception de la philosophie ou, en histoire, des approches de Maurice Olender. En général, la notion de laideur pourrait être lue comme une antivaleur, puisqu’elle est principalement définie comme le manque de beauté, de « bonne » forme (notons le a privatif dans des termes comme aschêmos ou amorphos). Chez les philosophes, elle peut être conçue comme un détail de la beauté ou même comme beauté en tant que révélateur de la vie et de son mouvement.
Dans des sociétés où les apparences et les attitudes sont sujettes à un examen social permanent, l’aspect de la personne est aussi important au point de vue individuel que collectif. Selon les traités anciens de physiognomonie, la laideur physique révèle la laideur psychique. En opposition au sage, l’homme commun, constituant la mesure de sa propre beauté, dénigre ce qui l’en éloigne et marque son déclin, que cela soit dû à l’âge ou à la maladie, aux déformations congénitales, aux caractéristiques ethniques particulières ou aux signes d’assujettissement social. Le corps n’est pas non plus une réalité figée : il change selon l’âge jusqu’à la dégradation finale. La vulnérabilité corporelle ou l’altérité physique provoquent rarement la pitié ou la sympathie : elles constituent souvent et diachroniquement un lieu de rire facile.
Toutefois, la laideur est « bonne à penser », de par sa multitude de fonctions : elle peut cacher la beauté intérieure (voir les exemples d’Ésope, Socrate, l’apôtre Paul), la déployer peut servir à signifier l’état émotionnel interne (donner à son corps les caractéristiques du deuil, c’est l’enlaidir). Elle peut inspirer la peur et donc servir d’outil pédagogique (Ésope est acheté en tant que pédagogue/épouvantail pour assagir les enfants turbulents d’un magasin d’esclaves). La laideur sert aussi à amuser, à provoquer le rire : « le risible », dit Aristote, « est une partie du laid ». Enfin, elle peut aussi servir de motif d’exclusion : les « autres » et particulièrement les « faibles » sont par nature repoussants. Ainsi, la laideur physique et morale marque des relations hiérarchisées et qualifie des modes de pouvoir.
Dans la mentalité chrétienne, la beauté, en tant que signe de la perfection, renvoie à l’image de Dieu, alors que la laideur manifeste son contraire, le Diable. C’est ainsi que le prince juste incarne la beauté, en tant que représentant authentique de Dieu sur terre ; par opposition, le tyran constitue une figure au corps monstrueux – le monstre représentant la laideur ultime, caractéristique diabolique par excellence. Enfin, la laideur morale attribuée aux impies, aux infidèles, voire aux juifs, constitue un topos qui les distingue des bons chrétiens. En contexte chrétien, la laideur définit-elle également des relations hiérarchisées, à la fois sur terre et au ciel (et en enfer) ?
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Organizers
Bernard Legras (ANHIMA et Université Paris I : Panthéon-Sorbonne)
Véronique Mehl (Université Bretagne-Sud)
Petra Pakkanen (Finnish Institute at Athens)
Maria Patera (Université de Thessalie)
Jenny Wallensten (Swedish Institute at Athens)
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Programme
Thursday, September 21
9.30-10.00: Ouverture J. Wallensten, P. Pakkanen, V. Mehl, B. Legras, M. Patera
10.00-11.00: Philippe Borgeaud, Figures de la laideur. Hommage à Maurice Olender.
11.00-11.30: Coffee Break
Session 1. Percevoir la laideur
Chair: Stella Georgoudi
11.30-12.00: Petra Pakkanen, Smelly business: The case of Cleon the tanner and ugliness of smell.
12.00-12.30: Véronique Mehl, « Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve (Baudelaire) » : lecture sensible de la laideur.
12.30-13.15: Discussion
Session 2. Figurer la laideur
Chair: Bernard Legras
16.00-16.30: Dimitris Palaiothodoros, Laideur du corps, laideur du visage dans la céramique peinte archaïque et classique.
16.30-17.00: Athanasios Semoglou, Laideur et beauté -physiques et morales : deux valeurs inversement proportionnelles dans la théologie et l’art byzantin.
17.00-18.00: Discussion
Friday, September 22
Session 3. Exprimer la laideur
Chair: Jean-Baptiste Bonnard
9.30-10.00: Typhaine Haziza, Il était une fois… une “laide” devenue reine : l’histoire de la mère de Démarate (Hérodote, VI, 61-69).
10.00-10.30: Bernard Legras, Beauté et laideur dans la paideia de l’Égypte ptolémaïque et romaine.
10.30-11.00: Discussion
11.00-11.30: Coffee Break
11.30-12.00: Maria Patera, Attitudes grecques envers la laideur.
12.00-12.30: Lydia Papariga-Artémiadi, Des humains à la forme animale et des « morts enflés comme des tambours ». Dimensions juridiques de la laideur extra naturam dans l’Antiquité et à Byzance.
12.30-13.00: Discussion
13.00-13.30: Conclusions
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The majority of the talks will be given in French.